Je vous mets ci dessous la transcription épurée d'un article que j'avais publié il y a quelques années dans une revue numismatique à l'occasion de la découverte d'un nouveau millésime d'une monnaie d'or de Louis II de Montpensier. C'est encore aujourd'hui le seul exemplaire connu à ce millésime.
Dombes : 1579, un millésime inédit pour une pistole de Louis II de Montpensier
L’objet de cet article est de faire découvrir au lecteur une monnaie exceptionnelle de la Dombes. Il s’agit d’une pistole d’or de Louis II de Montpensier de 1579, millésime encore inconnu à ce jour.
Il est en effet peu courant de mettre au jour un nouveau type ou un nouveau millésime, mais c’est plus rare encore en ce qui concerne les monnaies d’or, car elles représentent une grande valeur et ont de tout temps été thésaurisées. La grande majorité d’entre elles est donc connue, décrite et répertoriée.
Le monnayage d’or en Dombes
Le monnayage d’or de la principauté de la Dombes est intéressant à plus d’un titre. Autant le monnayage d’argent, billon et cuivre copie les modules, types et même portraits du monnayage royal de l'époque, autant le monnayage d’or s’en démarque par des emprunts aux pays voisins, Italie et Espagne notamment.
Le numéraire d’argent et de billon, puis ultérieurement de cuivre, était utilisé quotidiennement dans les transactions courantes. De plus, le monnayage de la Dombes avait pour particularité d’être accepté dans tout le royaume par privilège du roi. Il devait donc être facilement et immédiatement identifiable par des utilisateurs qui n’étaient pas nécessairement lettrés.
A l’inverse, le numéraire d’or constituait à la fois une vitrine (affirmer le prestige d’un prince, montrer le savoir-faire des monnayeurs), et était utilisé pour des transactions « internationales », de par sa valeur libératoire élevée. Il pouvait donc s’asseoir visuellement sur des représentations plus larges puisque s’adressant à des utilisateurs avertis et fortunés. Pour autant, très peu d’exemplaires nous sont parvenus, et ce, pour tous les princes qui en ont produit, accréditant plutôt l’hypothèse d’émissions de prestige.
La pistole
La pistole, héritée du système monétaire de l’Espagne, représentait la valeur de deux écus, son poids moyen s’établissant en Dombes à 6,53 grammes. Elle est communément appelée « double écu », la demi-pistole prenant la dénomination attendue d’« écu ». Seuls Louis II de Montpensier, François II de Montpensier et Gaston d'Orléans ont émis des pistoles.
La pistole de la Dombes la plus communément rencontrée est celle au millésime 1578 pour Louis II. Elle est recensée dans de nombreuses collections, tant publiques que privées, et bien sûr dans les ouvrages de référence.
Pour ce qui est des autres millésimes au nom de Louis II de Montpensier, Mantellier cite un exemplaire de 1575 dans le cabinet du Roi ; un autre, de 1582, s’est vendu à Paris en 2006, lors de la dispersion de la collection Couchard.
La logique voudrait que d’autres millésimes apparaissent, en particulier postérieurs à 1574, millésime décrié par l’ordonnance de septembre 1577 selon Poey D’avant, d’autant que les demi-pistoles sont, elles, connues en 1575, 1577, 1578, et 1579.
Dans toute l’histoire de la production monétaire de la principauté, il y a des « manques » importants dans la suite des millésimes, et ce dans tous les métaux. Mais notre expérience montre que des découvertes régulières les comblent peu à peu.
C’est dans ce contexte que nous avons été amenés à une découverte importante avec un millésime inédit dans cette série de pistoles pour Louis II de Montpensier.
Atelier de Trévoux, Pistole, or - 1579
+ LVDO . P . DOMBARVM . D . MONTISP Ecu de Bourbon couronné
+ DNS . ADIVTOR . ET . REDEM . MEVS . 1579 Croix feuillue
6,5 g
Divo Dombes -, Poey d’Avant -, Mantellier -, Boudeau -, Sirand -, Friedberg -
Cette monnaie, quoique montrant des signes d’usure, reste suffisamment bien conservée pour pouvoir être comparée aux exemplaires connus des autres millésimes. Les poids et diamètre sont ceux attendus pour une telle pièce, les légendes d’avers et de revers sont identiques à celles du plus grand nombre des exemplaires de 1578.
Si l’on excepte, bien sûr, les deniers et doubles tournois, que l’on retrouve en abondance, de même que les douzièmes d’écu d’Anne-Marie Louise de Bourbon Montpensier, les fameux Luigini, plusieurs éléments laissent penser que les émissions monétaires de la Dombes étaient de faible abondance. Le peu d’exemplaires qui nous sont parvenus tout d’abord, mais également l’observation des liaisons de coins : il est bien rare que ces monnaies, connues à quelques exemplaires seulement, ne partagent pas entre elles au moins l’un des deux coins, d’avers ou de revers. À titre d’exemple, notre exemplaire du quart d’écu de Henri II de Montpensier partage les coins d’avers et de revers avec celui de la vente Claoué. Plusieurs autres exemples analogues laissent penser que le nombre de coins fut très réduit, et partant, la production aussi. Il n’y a néanmoins aucun élément permettant de penser que la production, même faible, n’ait pas été continue. Des exemplaires de 1575 à 1581 existent donc probablement dans diverses collections privées. L’intérêt grandissant pour les monnayages provinciaux ne devrait pas manquer de les faire réapparaître au grand jour…
Merci de m'avoir lu courageusement jusqu'au bout